Mettre en lumière les interactions entre
la musique et la société
C'EST QUOI ?
L’ethnomusicologie est une science qui étudie la relation entre la musique et la société. Cette discipline appartient à plusieurs champs scientifiques : l’anthropologie, la musicologie et l’ethnologie. Ce domaine d’étude est assez vaste et très récent puisqu’il existe seulement depuis les années 1950. Pour récolter des données, cette science utilise des méthodes comme du travail sur le terrain, des entretiens et des observations.
En 2016, le chercheur Nick Wees de l’Université Western Ontario à London, Canada, s’est basé sur des données récoltées grâce à ses observations et des entretiens semi-directifs avec des musiciens de rue, pour étudier leurs pratiques musicales dans le métro. Les observations ont permis au scientifique de constater que les musiciens prennent en compte la disposition et les caractéristiques sonores des lieux. Par exemple, proche du quai du métro, les bruits ambiants sont plus forts, ils utilisent donc du matériel permettant d’amplifier leurs performances. De même pour un couloir étroit et un hall, les caractéristiques acoustiques ne sont pas les mêmes. Dans le hall l’écho sera plus important tandis que dans le couloir, c’est la réverbération de la musique qui sera plus importante.
Les entretiens semi-directifs lui ont permis de déterminer les motivations des musiciens. Se produire dans des lieux comme le métro présente un certain nombre de contraintes. La motivation commune qui ressort est l’envie d’embellir ce type d’endroit, d’échanger une performance et un moment privilégié avec les passants.
Musicien jouant sur un quai de métro à New York, États-Unis.
© Florian Schneider
Expérience de Milgram
C'EST QUOI ?
Les participants de l’expérience de Milgram étaient quarante hommes âgés de 20 à 50 ans de milieux socio-professionnels différents. Au début de l’expérience, les participants sont présentés à un autre participant qui était un complice de l’expérience. Ils tiraient au hasard (de manière truquée) pour désigner un interrogateur et un élève, le volontaire tombant toujours sur le rôle d’interrogateur.
Schéma de l’expérience de Milgram ©wikicommons
L’élève était placé sur une chaise avec une électrode au bras. L’interrogateur était dans une autre salle, à ses côtés un faux scientifique en blouse blanche lui donnant les instructions. L’interrogateur était placé face à une machine composée de trente manettes allant de 15 à 450 volts. Il faut savoir qu’une décharge de 450 volts est potentiellement mortelle. Les manettes étaient accompagnées de mentions allant de choc léger à choc dangereux. L’élève devait répondre à des exercices de mémoire et dès qu’il se trompait, l’interrogateur devait envoyer une décharge électrique. Le voltage augmentait d’un cran à chaque mauvaise réponse. Le complice ne recevait pas vraiment les décharges, le but était d’étudier le comportement de l’interrogateur face à la supposée douleur qu’il infligeait à l’élève. Des cris de douleur étaient pré-enregistrés et diffusés en fonction du voltage infligé. L’objectif était donc de déterminer à quel point l’interrogateur pouvait obéir aux ordres du scientifique à côté de lui.
Les résultats des expériences ont terrifié l’équipe de recherche, 63 % des interrogateurs sont allés jusqu’à une décharge de 450 volts. La moyenne des chocs reçus était de 360 volts. Tous les sujets ont au moins infligé une décharge de 135 volts et aucun sujet ne refusa de participer à l’expérience.
Une nouvelle théorie sort de cette expérience : lorsqu’un individu est intégré à une organisation sociale hiérarchique et qu’il est confronté à une autorité, il peut subir une sorte d’altération de son fonctionnement psychologique habituel permettant d’accepter le contrôle total de l’autorité. Il s’agit de l’état agentique.
Vidéo de présentation de l’expérience de Milgram ©J B
Si vous êtes curieux, voici un documentaire sur une expérience équivalente.
Les modèles prédictifs
C'EST QUOI ?
Des modèles mathématiques sont couramment utilisés par de nombreux acteurs : les météorologues, les assureurs, les professionnels du tourisme, les sismologues, les communicants mais également par la police. L’idée est de prendre une somme de données passées afin de pouvoir prédire les futurs comportements. Nos comportements ne seraient donc pas régis par l’instinct et l’incertitude mais seraient prévisibles.
À l’image de Minority Reports, le célèbre film de Steven Spielberg inspiré d’une nouvelle de Philippe K. Dick, un logiciel de prédiction du crime, “predpol” a été conçu à partir des travaux de la mathématicienne Andrée Bertozzi et de l’anthropologue Jeffrey Brantingham. Le principe est simple : à la manière des tremblements de terre, lorsqu’un crime est commis dans un secteur, la probabilité qu’il y ait de nouveau un crime dans ce même secteur est élevée dans les heures qui suivent. L’algorithme couple les données sur les comportements des criminels avec l’historique des crimes dans une ville. Il promet ainsi l’anticipation de crimes jusqu’à 12 h avant qu’ils ne se produisent. Bienvenue en 2054 à Washington, predpol a remplacé les precogs.
Ce logiciel a notamment été utilisé par la police de Los Angeles, entre 2010 et 2020, avant d’être abandonné. Ses détracteurs prétendent que le taux de criminalité n’a pas significativement diminué avec l’aide de cet outil pourtant prédictif et il serait même à l’origine de biais qui stigmatisent certaines populations. Un des biais est que le logiciel puise dans les bases de données construites par la LAPD, à qui il est reproché d’avoir des pratiques discriminatoires. Autre problème, les policiers connaissent déjà les quartiers où les crimes sont les plus commis et n’auraient en réalité pas besoin du logiciel pour savoir où patrouiller. La police de Los Angeles abandonne le logiciel en 2021. La lutte contre le crime continue.
Vidéo explicative de la prédiction du crime de la chaîne YouTube Fouloscopie. ©Mehdi Moussaid
Mobilisation numérique : l’exemple « Storm Area 51 »
C'EST QUOI ?
Un mouvement social est en sociologie un réseau informel organisé d’individus, basé sur un agir commun intentionnel avec un projet de mobilisation de concert selon une logique revendicative et de défense d’intérêt ou d’une cause. La théorie des mouvements sociaux repose sur les conceptions du comportement collectif qui ont émergé au XXe siècle et sur l’étude des facteurs favorisant l’engagement individuel à l’action collective.
À l’origine une simple blague, l’événement Facebook « Storm Area 51 : They Can’t Stop All of Us » est créé le 27 juin 2019. En quelques jours, cette page rassemble plus de deux millions de participants sur la page pour envahir la zone 51 afin d’y trouver des extraterrestres. Cet endroit est une aire d’environ 155 km2 faisant l’objet de plusieurs théories ufologiques et complotistes. La base militaire américaine de ce site contiendrait selon ces théories, des technologies extraterrestres voire même des aliens. Plutôt destiné à moquer ces théories complotistes, l’événement Facebook fait pourtant le tour du monde et la quantité de participants en ligne fait réagir le gouvernement, le conduisant à produire des publications officielles pour dissuader les participants. Son créateur est même interpellé par le FBI (Bureau fédéral d’enquête). Lors du jour de « l’assaut » donné le 20 septembre 2019, il n’y eut cependant qu’une cinquantaine de personnes à l’entrée de la zone 51 et pratiquement aucune arrestation.
Bien que l’affaire se soit terminée dans le calme, elle montre un tour de force de la puissance mobilisante des réseaux sociaux qui a rassemblé en ligne des millions de personnes en quelques jours. Cette nouvelle forme de mobilisation grâce aux réseaux sociaux est plutôt attribuée à des mouvements sociaux contestataires comme par exemple celui des Gilets jaunes, qui a pris l’ampleur qu’on lui connaît grâce aux réseaux sociaux.
Le sociologue Jan Spurk définit ces nouveaux types de mouvements politiques par trois caractéristiques. Leur caractère soudain et imprévu, l’usage massif de technologies d’information et de communication (comprenant les réseaux sociaux) ainsi que leur popularisation massive au plan mondial par les médias et l’industrie culturelle. L’événement « Storm Area 51 » semble par cette définition très bien correspondre à ce type de mouvement, que Romain Badouard, chercheur en sciences de l’information et de la communication, appellerait des « mobilisations de clavier ».
Bien qu’il ne soit cependant pas contestataire, le fondement humoristique de cette mobilisation repose pourtant sur des théories complotistes. Elles sont dénonciatrices et accusatrices envers un gouvernement qui cacherait des choses à sa population. L’événement « Storm Area 51 » semble comporter les traits caractéristiques d’un mouvement social numérique sans en partager la finalité, l’un revendicateur et l’autre pour amuser la toile.
Vidéo d’information sur l’événement “Storm Area 51” par le journal Le Parisien.
Sources
Mettre en lumière les interactions entre la musique et la société
- Larousse, ethnomusicologie : www.larousse.fr
- Nick Wees, Expérience acoustique et pratiques musicales de musiciens de métro, revue Anthropologie et société, 2019 : www.erudit.org
- Image de fond : ©Marius Masalar
Expérience de Milgram
- McLeod, S. A. The Milgram Experiment, 2007 : www.simplypsychology.org
- Image de fond : ©Ibrahim Boran
Les modèles prédictifs
- Arnaud Devillard, Police prédictive : « Predpol ressemble à l’algorithme d’Uber », Sciences et Avenir, 2020 : www.sciencesetavenir.fr
- Benbouzid, Bilel, Des crimes et des séismes. La police prédictive entre science, technique et divination, Réseaux, 2017 : www.cairn.info
- François Saltiel, Le meilleur des mondes : « Police prédictive, LegalTech : les algorithmes font-ils la loi ? », France culture, 2021 : www.radiofrance.fr
- Bugeja-Bloch, Fanny, et Marie-Paule Couto, L’usage des statistiques en sciences sociales, Les méthodes quantitatives, presses Universitaires de France, 2015 : www.cairn.info
- Image de fond : ©Emiliano Bar
Mobilisation numérique : l’exemple « Storm Area 51 »
- Sandrine Rui, Mouvements sociaux, sociologie, 2016 : openedition.org
- Fabien Granjon, Résistances en ligne : mobilisation, émotion, identité, Variations, 2017 : openedition.org
- Vernier, J, Gilets Jaunes : la carte (les réseaux sociaux) précède le territoire (les ronds-points), Quaderni, 2020 : www.cairn.info
- Image de fond : ©Michael Herren